Zone noire, jaune, orange et … argent

L'administration s'est appuyée sur quatre critères officiels pour délimiter les zones noires, jaunes, orange. Plus un, officieux : l'argent.

Officiellement, le découpage a obéi aux règles de l'art. Il s'est appuyé sur quatre critères : la hauteur et la vitesse de l'eau constatée pour chaque zone lors de la tempête ; la proximité d'un endiguement ; la topographie des lieux, surtout s'ils forment une cuvette ; enfin la possibilité de se protéger.

« L'étude a été conduite par des ingénieurs et techniciens de la Direction départementale des territoires et de la mer, renforcés par 14 experts nationaux, précise la préfecture. Elle a été complétée par des visites de terrain et plusieurs échanges avec les maires. »


« Incompétents »

Les sinistrés restent persuadés que la cartographie a été bâclée dans l'urgence, dans quelque bureau de La Rochelle ou de Paris, par quelque technocrate pressé qui a rayé d'un coup de plume des centaines de maisons. Mais ce qui les choque le plus, c'est l'incohérence du résultat final, son iniquité aussi. Le cas du père Dubois n'est pas isolé. Les associations de victimes ont toutes leurs « aberrations », ces habitations épargnées coloriées en noir ou ces maisons voisines qui affichent des couleurs différentes.

Pourquoi pas l'île de Ré ?

Aux quatre critères pris en compte, disent-ils, s'en ajoute un cinquième, tout aussi objectif mais plus difficilement avouable : l'argent. « Tout le monde n'a pas été traité de la même façon . Je connais un lotissement à Saint-Clément-des-Baleines [dans l'île de Ré] qui a été inondé et qui échappe à la zone noire. » Idem aux Portes-en-Ré, ajoute Léon Gendre, qui s'interroge, faussement naïf : « Les propriétaires des villas à 2 ou 3 millions d'euros bénéficieraient-ils d'un traitement de faveur ? »

La réponse est oui. Dans ce canton nord de l'île de Ré, prolongement balnéaire de l'axe Auteuil-Neuilly-Passy, la logique financière a prévalu.

« Le vrai critère, c'est combien ça coûte… » confirme un fin observateur des choses rétaises. « Du côté de La Patache ou de Trousse-Chemise, tout le monde sait que ça prend l'eau, mais ce sont des propriétés à plusieurs millions d'euros. Les exproprier plomberait vite fait le budget d'indemnisation. Pour une villa des Portes, vous rasez tout les Boucholeurs ! »

Le lobby du 16e (arrondissement) aurait-il fait le siège des ministères ? « Pas besoin. Cette donnée a été intégrée d'emblée. C'est pour la même raison, et aussi pour l'emploi, que la thalasso de Sainte-Marie-de-Ré, qui baignait dans près de 2 mètres d'eau, a été épargnée, de même que la zone artisanale de La Couarde ou l'hôtel-restaurant 4 étoiles Les Mouettes, à Aytré, seule tâche orange au milieu du noir. »

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